Dans une réponse écrite au député du Nord Jean-Jacques Candelier, Mme Fleur Pellerin pose un certain nombre d’éléments fondateurs d’une politique industrielle du logiciel libre, sur les thématiques des propositions concrètes que le CNLL lui a communiquées en septembre dernier.
En premier lieu, Mme Pellerin constate que les logiciels libres représentent un “modèle [qui] revêt un intérêt qui n’est plus à démontrer aujourd’hui.”
Rejoignant ensuite le préambule des propositions du CNLL, elle souligne que le logiciel libre représente “une opportunité qu’il importe de saisir pour la modernisation, l’efficacité et la transparence de l’État”, dans le cadre du développement de l’administration électronique, en termes notamment d’accessibilité aux données, d’interopérabilité et de maîtrise des coûts. Elle réitère et appuie ainsi le message que le Premier Ministre Jean-Marc Ayrault avait fait passer en septembre dernier, par sa circulaire portant sur l’usage des logiciels libres dans l’administration..
Elle affirme enfin l’enjeu stratégique que constitue le logiciel libre pour la compétitivité de nos industries, toutes branches confondues. C’est également un point qui motive fortement nos actions au sein du CNLL.
Elle décrit ensuite le cadre de la politique qu’elle entend mettre en œuvre.
Premièrement, faire en sorte “que le cadre législatif européen reste favorable à une croissance forte du logiciel libre”. C’est essentiellement l’axe 2 de nos propositions, “maintenir un cadre juridique qui ne défavorise pas le Logiciel Libre”. Si nous nous réjouissons de cette déclaration, nous restons attentifs à ce que sur les sujets concrets qu’elle recouvre, et qui constituent nos propositions 4 à 6 (“faire barrage aux brevets logiciels”, “pour des standards ouverts vraiment ouverts” et “agir pour préserver la neutralité du Net”), l’action de son Ministère soit conforme à ses déclarations d’intentions.
Sur les brevets logiciels, nous avions pris note des promesses du candidat François Hollande: “Nous veillerons à ce que la mise en œuvre du brevet communautaire ne soit pas l’occasion de légitimer les brevets sur les logiciels, les méthodes mathématiques et les méthodes commerciales”. Cependant, l’instauration récente du brevet unitaire sans contrôle indépendant sur l’Office Européen des Brevets nous semble un risque très sérieux de légitimer les brevets logiciels abusivement délivrés par cet organisme et de conduire à une inflation du nombre de brevets permettant aux “patent trolls” de racketter les véritables innovateurs, comme c’est déjà le cas aux États-Unis.
Sur la neutralité du Net, Mme Pellerin déclarait avant-hier s’en remettre à l’avis du Conseil National du Numérique. Nous regrettons qu’elle n’ait pas pris une position plus tranchée, comme l’avait fait en mai dernier François Hollande en déclarant notamment : “L’existence de réseaux libres et ouverts, sans filtrage ni bridage, et plus généralement la neutralité du Net sont des principes à protéger afin de garantir la liberté d’expression, la non discrimination et le caractère de bien commun essentiel des infrastructures numériques.”
Dans sa réponse au député Candelier, Mme Pellerin se déclare ensuite favorable au “soutien à la recherche et au développement (R&D) […] élément clé du développement du secteur du logiciel libre.” Ici encore, cette position nous satisfait dans la mesure où elle rejoint l’axe 3 de nos propositions concrètes : “Préparer l’avenir en encourageant l’innovation et la formation.”
Finalement, nous aurions souhaité que Mme Pellerin aborde également d’autres points qui nous tiennent à coeur : la préférence raisonnée pour le logiciel libre dans la commande publique, par exemple en rétablissant et en généralisant la circulaire DEFM0652897X de 2006 du Ministère de la Défense, ou la place du logiciel libre dans l’enseignement et la formation. Il s’agit certes de domaines qui dépendent principalement d’autres ministères ; nous espérons donc que Mme la Ministre saura également convaincre ses collègues des ministères concernés, notamment à l’occasion du prochain séminaire gouvernemental sur le numérique.
A propos du CNLL (www.cnll.fr)
Le Conseil National du Logiciel Libre est l´instance représentative, au niveau national, des associations et groupements d´entreprises du logiciel libre en France. Le CNLL représente 11 associations et groupements, et par leur intermédiaire plus de 300 entreprises françaises spécialisées ou avec une activité significative dans le logiciel libre. Le CNLL a pour principale mission de représenter l´écosystème du logiciel libre auprès des pouvoirs publics et des organisations nationales et internationales existantes.