Le 30 octobre 2024, le CNLL et CINOV ont été reçus par le Directeur de Cabinet de Madame Chappaz, Secrétaire d'État auprès du ministre de l'Enseignement supérieur et de la Recherche, chargée de l'Intelligence artificielle et du Numérique. Cet entretien a permis de présenter les positions et messages clés des deux organisations sur les dispositifs de soutien à l'innovation, mais également sur d'autres sujets tels que la cybersécurité et l’interopérabilité.
Les réactions et précisions apportées par le Secrétaire d'Etat montrent que diverses options d'aménagement des dispositifs sont actuellement étudiées, plutôt que des suppressions. Des réponses précises devraient arriver dans les deux semaines qui viennent.
Le Parlement va avoir un poids important dans les arbitrages à venir, et à ce titre nous vous invitons à contacter vos représentants au Parlement.
Voir ci-dessous la tribune co-signée par le CNLL, le fédération Cinov et Cinov Digital.
Voir la tribune publiée dans Le Monde (réservé aux abonnés)
Voir l'article précédent du CNLL
Budget 2025 : à qui profite le CIR ?
Le crédit d’impôt recherche (CIR) et le crédit d’impôt innovation (CII) sont des dispositifs essentiels au soutien de l’innovation en France. Toutefois, à l’heure où le gouvernement cherche à réaliser des économies budgétaires drastiques, il est légitime de questionner leur efficacité et la manière dont les aides sont réparties, en particulier entre les grandes et les petites entreprises. Si le CIR montre des effets très positifs pour les petites entreprises et les microentreprises investies dans la technologie, plusieurs études économiques récentes révèlent qu'il a peu d’impact sur la R&D des grandes entreprises et des ETI, pour lesquelles il n’a d'effet probant ni sur l’emploi ni sur l’investissement en R&D. Nous demandons donc qu'il soit rééquilibré au profit des TPE/PME.
La R&D privée est un levier crucial de productivité à long terme. Pourtant, la part des dépenses de R&D dans le PIB français reste à 2,2 %, bien en deçà de l’objectif de 3 % fixé par la stratégie de Lisbonne en 2000 et nettement inférieure à celle de notre voisin allemand (3,1 %) ou des États-Unis (3 %). Il est alors impératif de maximiser l’efficacité des aides publiques, en orientant les ressources vers les entreprises qui en ont le plus besoin, là où ces ressources génèrent le plus de résultats. Des études du Conseil d’analyse économique montrent que le « retour sur investissement » du CIR est deux fois plus élevé lorsqu’il est dirigé vers les TPE et PME, qui transforment ces aides en innovations concrètes, en croissance et en emploi qualifié. Pour renforcer durablement le tissu d’innovation français, il est indispensable de repenser l’allocation des ressources du CIR.
Recentrer le CIR pour une meilleure efficacité
Les économistes doutent que le CIR, qui au-delà de 100 millions d’euros de dépenses de R&D voit son taux réduit à 5 %, représente une incitation forte à investir pour les grandes entreprises, qui auraient de toute façon déjà engagé ces dépenses. L’effet incitatif marginal du CIR pour ces entreprises est faible, et une réallocation des ressources vers les plus petites structures (TPE et PME) serait bien plus efficace.
Pour optimiser l’efficacité du CIR, il apparaît nécessaire de libérer des fonds à rediriger vers les TPE et PME, qui sont bien plus sensibles aux incitations fiscales et pour lesquelles l’impact du CIR sur la capacité d’innovation et la croissance est nettement plus marqué. Une piste d’action raisonnable, au vu des chiffres et des analyses économiques, est de plafonner les aides accordées aux grandes entreprises. De plus, pour garantir que les fonds publics ainsi mobilisés profitent durablement à l’économie nationale, les entreprises bénéficiaires du CIR pourraient être soumises à des mécanismes de remboursement des aides en cas de délocalisation ou de rachat par des entités étrangères. Ce principe renforcerait la cohérence du dispositif avec l’objectif de souveraineté technologique et économique.
Le CII : un levier crucial pour les TPE et PME
Le crédit d’impôt innovation (CII) complète efficacement le CIR, en soutenant spécifiquement les TPE et PME dans leurs projets d’innovation, en particulier pour le développement de prototypes et d’innovations technologiques. En 2021, environ 10 300 entreprises ont bénéficié du CII, avec une aide moyenne de 35 000 €. Ce dispositif, qui ne représente que 5 % du coût total du CIR, a démontré son efficacité en générant des créations d’emplois et en accélérant la mise sur le marché de nouveaux produits.
Le CII arrive cependant à échéance cette année. Sa disparition actuellement programmée mettrait, sans aucun doute, en danger de nombreux projets innovants portés par des TPE et PME. Il est indispensable de reconduire un dispositif efficace, d’une importance vitale pour les entreprises innovantes, car celles-ci dépendent directement de ces aides pour développer leurs projets et stimuler leur croissance.
Nous, représentants des TPE et PME de l’innovation, appelons les parlementaires et le gouvernement, dans le respect des contraintes budgétaires, à rationaliser le dispositif en partie décrié (CIR) pour qu’il devienne un instrument plus efficace et équitable, et, en parallèle, à reconduire celui qui a su faire ses preuves (CII). Les ressources doivent être orientées vers les TPE et PME, où elles génèrent le plus de résultats en termes d’innovation, de croissance et de compétitivité. En maintenant et en renforçant ces dispositifs, la France pourra non seulement préserver son tissu d’entreprises innovantes, mais aussi continuer à jouer un rôle de premier plan dans l’innovation au niveau mondial et garantir sa souveraineté technologique et industrielle.
Sources :
- Le CIR en 2021 (données provisoires), MESR-DGRI, août 2023.
- CAE : focus n° 090‐2022 septembre 2022 - Renforcer l’impact du Crédit d’Impôt Recherche, Philippe Aghion, Nicolas Chanut et Xavier Jaravel.
Tribune co-signée par :
- la Fédération Cinov, organisation patronale représentative des métiers de la prestation intellectuelle du conseil, de l’ingénierie et du numérique.
- Cinov Digital, syndicat de la Fédération Cinov.
- le CNLL, l’Union des entreprises du logiciel libre et du numérique ouvert, organisation représentative des entreprises de la filière open source.